lundi 14 avril 2008


Artaud? les mots sur Artaud ne sont que bulbes de savons, une fumée devant le pouvoir du corps, des grimaces en face de ces portraits incrustés à jamais dans le mur de ce siècle.

Artaud, qui es tu?


Qui suis-je?
D'où je viens?
Je suis Antonin Artaud
et que je le dise
comme je sais le dire
immédiatement:
vous verrez mon corps actuel
voler en éclats
et se ramasser
sous dix mille aspects
notoires
un corps neuf
où vous ne pourrez
plus jamais m'oublier.

Inutile!

Le temps passe et la poisse. Il monte dans le métro, bras secoués, largement souriant, bouche béate,l'air d'un grand homme insouciant, l'air d'un point d'exclamation dans la mare de gens fatigués, têtes dans les journaux gratuits, têtes qui somnolent, têtes dans les livres, oreilles penchées aux portables ou collées aux écouteurs. Et la bouche s'ouvre, le visage se dilate sur une moquerie coincée aux lèvres "Vous, vous savez depuis quand le temps a t-il commencé?", Silence, point d'interrogation, et les têtes se lèvent, des sourires étirés sur un côté, comme un corps ennuyé jeté sur un fauteuil dans une salle d'attente , quelques regards le scrutant de bas en haut, de haut en bas. Il répète "mais vous ne savez pas, vous ne pouvez pas le voir, mais c'est vrai quoi, réfléchissez un peu avec moi". Il tourne dans le wagon, pousse les épaules entassés, fredonne un air et repose la même question. Les têtes replongent dans les papiers, c'est qui ce perdu... encore un clochard, mais qui ne pue pas, qui ne mendie pas. Un décor traditionnel des wagons, qui sillonnent le temps et rythment les vies... drôle de clochard. Ainsi les vagabonds des wagons, ne reçoivent que quelques expressions d'embêtement, des yeux baissés pour éviter la confrontation des regards qui dévisagent, qui perturbent le monde bâti par chacun avec tant d'acharnement, tant d'efforts. Surtout pas voir, ni entendre ce genre de question inutile. hein, le temps? c'est le temps qui se gère, qui se module, qui se capitalise en argent, en production... le temps dont on doit toujours "en profiter" pour avoir plus de temps pour à nouveau pouvoir "en profiter" pourquoi? pour surtout ne pas voir ces perdus, ce perturbés, qui ne sont qu'une simple perte du temps... Et le train continue sa course, ceux qui descendent, ceux qui montent, le temps ne dit pas son nom tout de suite, il laisse aux sociétés le soin de le dire, de prononcer son nom, de témoigner de l'inutilité de ce train et de l'utilité des vagabonds. Après quelques siècles?